Vulnérabilité financière : les aidants encore peu aidés

Partager cet article

Près d’un tiers des actifs de plus 50 ans qui aident une personne dépendante rencontrent des difficultés financières selon l’étude Audencia-Humanis. Une vulnérabilité financière que souligne également le rapport de Dominique Gillot, la présidente du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) qui propose 30 mesures.

Par Frédéric Roullier « Directeur des Opérations Retraite et Assurances de Personnes », groupe Humanis

Les aidants sont très fragilisés. Le fait d’être aidant, c’est-à-dire d’apporter une aide bénévole et régulière à un proche en situation de perte d’autonomie, est un facteur de vulnérabilité  financière : 30% des actifs aidants de plus de 50 ans déclarent avoir du mal à payer leurs frais de santé ou leurs impôts selon l’étude Audencia-Humanis parue fin juin 2018.

Et une fois à la retraite, les difficultés financières des aidants sont encore plus fortes : 62% des retraités-aidants avouent peiner à faire face aux besoins de la vie quotidienne une fois leurs charges fixes réglées. Bon nombre des retraités n’ont en effet pas suffisamment anticipé la baisse de revenus au moment du passage à la retraite à laquelle s’ajoute le soutien financier souvent apporté à la personne aidée. L’allocation personnalisée d’autonomie (APA) ne permet le financement que d’une partie des dépenses engendrées par la perte d’autonomie.

Le rapport de Dominique Gillot, la présidente du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), remis le 19 juin 2018 aux ministres Agnès Buzyn, Muriel Pénicaud et Sophie Cluzel constate que les proches aidants cumulent les risques de rupture professionnelle et d’isolement.

« Beaucoup d’aidants, de particuliers ou de représentants associatifs, font état d’une gêne voire d’une diminution de leur pouvoir d’achat, liés à un arrêt de leur déroulement de carrière, à une réduction d’activité professionnelle (temps partiel, mi-temps), ou à une cessation d’activité professionnelle) », insiste le rapport Gillot.

Intitutlé « Sécuriser les parcours, cultiver les compétences, préserver nos aidants », le rapport de Dominique Gillot comporte deux tomes. Le premier est dédié à la situation des personnes handicapées dans l’emploi et le tome 2 est consacré à la conciliation rôle d’aidant/vie professionnelle. Il préconise un renforcement du statut des aidants afin de faciliter la préservation de la santé des aidants, leur maintien dans l’emploi, d’éviter les risques d’épuisement, d’isolement social et de désinsertion professionnelle.

Le rapport pointe notamment le dysfonctionnement de certaines mesures récentes comme le don de jours de RTT (réduction de temps de travail).

« Le don de RTT, légalisé et étendu début 2018 aux proches aidants des personnes âgées en perte d’autonomie par la proposition de loi du député Paul Christophe, est encore peu répandu. Au-delà de son caractère inéquitable et aléatoire, le don de RTT est plus adapté à un parent qui doit accompagner son enfant qui traverse une période critique (…). Dans tous les cas, limité dans le temps, si le don de RTT augmente la disponibilité ponctuelle des parents aidants familiaux ou de proches aidant une personne malade ou en fin de vie, il ne peut satisfaire une période d’absence régulière, prolongée, durable », indique le rapport Gillot.

La conciliation de deux vies : personnelles et professionnelles

La moitié des 11 millions d’aidants  sont actifs et doivent concilier vie professionnelle, vie familiale et rôle d’accompagnant. Leur position est d’autant plus compliquée que seulement 2% d’entre eux sont soutenus par leur entreprise et que seule la situation de 2 aidants sur 3 est prise en compte au sein de son environnement professionnel. Le rapport évoque différents points pour éviter la rupture du lien professionnel (tel que la reconnaissance du statut d’aidant, l’adaptation de l’organisation et du temps de travail) ou garantir le retour à l’emploi après une interruption.

Les employeurs peuvent jouer un rôle à jouer dans le soutien des aidants mais ils ne savent pas toujours comment faire. Pour cette raison le groupe Humanis a conçu « Ma Box Aidant ». Elle propose aux salariés un guide pratique et l’accès à un certain nombre de services à la carte.

« La box rassemble en seul coffret des services pratiques qui répondent aux préoccupations et aux besoins d’information et de soutien des aidants. De plus, c’est l’employeur qui finance l’achat de ce bouquet de services pour ses salariés aidants et qui leur offre une réelle solution clé en main. », explique Véronique Deshayes, chef de projet à la direction des activités sociales d’Humanis.

La santé des aidants

Dans leur vie personnelle aussi les aidants rencontrent des difficultés : 70% estiment ne pas avoir assez de temps pour eux, voire ne pas en avoir du tout.

Pour  29%, leurs activités quotidiennes d’aidants est source d’anxiété et de stress [5] ; 23% des aidants évoquent des effets sur la qualité de leur sommeil et 24% observent des conséquences sur leur moral [6].e risque de surmortalité est de 60% dans les 3 ans qui suivent le début de la maladie de leur proche en situation de perte d’autonomie et 1 aidant sur 3 de plus de 60 décède même avant son proche.

La prévention joue un rôle essentiel dans la préservation de l’état de santé des aidants comme le souligne le rapport :

« Face aux risques mieux identifiés, mais sans repères chiffrés là non plus, l’investissement dans la prévention des risques de perte d’autonomie, ou d’aggravation du déficit d’autonomie, fera gagner en qualité de vie, en sécurité et longévité en « bonne santé » de la personne aidée, mais aussi de l’aidant : il est nécessaire d’anticiper l’adaptation du domicile aux choix de vie de la personne et au maintien de sa vie sociale et d’œuvrer à produire plus de logement accessible. »

 

 


Partager cet article

Laisser un commentaire