Pierre Simon (Antel) : La télémédecine est le levier nécessaire pour réorganiser l’offre de soins hospitalière…

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Vous êtes le Président de l’Antel. Pouvez-vous présenter cette association ?

Créée en 2006, l’Association Nationale de Télémédecine a pour objet de développer la recherche clinique en télémédecine et de promouvoir de nouvelles organisations et pratiques médicales dans tous les domaines où la télémédecine peut apporter une valeur ajoutée à la prise en charge des patients. Avec la télémédecine, tous les patients atteints d’une maladie chronique peuvent être maintenus à domicile, en bénéficiant d’une surveillance à distance, en temps réel (ou différée selon les besoins).

Grâce aux dispositifs médicaux communicants installés à leur domicile ou dans des substituts de proximité, tout événement ou complication peut être instantanément diagnostiqué et suivi d’une décision thérapeutique adaptée et mise en œuvre sans délai. La télémédecine procure une aide efficace au médecin traitant pour le deuxième recours au spécialiste, particulièrement dans les cas ou le médecin traitant doit pouvoir s’appuyer en permanence sur des avis spécialisés.(suivi de certaines maladies chroniques) L’ANTEL a ainsi l’ambition de répondre à l’évolution de la pratique médicale et d’apporter une valeur ajoutée dans la filière de soins aux patients atteints de maladies chroniques.

L’ANTEL regroupe l’ensemble des équipes médicales et paramédicales qui pratiquent aujourd’hui en France la télémédecine. L’association entretient des relations de collaboration avec les sociétés savantes professionnelles et avec les Associations de patients dont le mode de prise en charge peut bénéficier du développement de la télémédecine.

Qu’est-ce que la Télémédecine ?

La télémédecine a été définie à l’article 78 de la loi HPST :et inscrite aujourd’hui dans le Code de la santé publique à l’article L.6316-1 ; «  La télémédecine est une forme de pratique médicale à distance utilisant les techniques de l’information et de la communication. Elle met en rapport entre eux ou avec un patient, un ou plusieurs professionnels de santé, parmi lesquels figure nécessairement un professionnel médical et le cas échéant, d’autres professionnels apportant leurs soins au patient.

« Elle permet d’établir un diagnostic, d’assurer, pour un patient à risque, un suivi à visée préventive ou un suivi post-thérapeutique, de requérir un avis spécialisé, de préparer une décision thérapeutique, de prescrire des produits, de prescrire ou de réaliser des prestations ou des actes, ou d’effectuer une surveillance de l’état des patients. Les actes de télémédecine sont définis par décret.

Le décret va paraître dans les prochains jours. Quatre actes principaux de télémédecine sont identifiés sont identifiés .

La téléconsultation a pour objet de permettre à un patient de consulter un professionnel médical. Un professionnel de santé peut être présent auprès du patient et, le cas échéant, peut assister le professionnel médical au cours de la téléconsultation.

La télé-expertise a pour objet de permettre à un professionnel médical de solliciter l’avis d’un ou de plusieurs professionnels médicaux en raison de leurs formations ou de leurs compétences particulières, sur la base des informations médicales nécessaires à la prise en charge d’un patient.

La télésurveillance médicale, acte de surveillance ou de suivi continu ou non continu, a pour objet de permettre à un professionnel médical d’interpréter les données nécessaires au suivi médical d’un patient et le cas échéant, de prendre les décisions relatives à la prise en charge de ce patient, sur la base de ces données. L’ enregistrement et la transmission des données peuvent être automatisés ou réalisés par le patient lui-même ou par un professionnel de santé..L’interprétation par le professionnel médical peut être réalisée, selon la nécessité médicale, en direct ou en différée dans le temps.

La téléassistance médicale a pour objet de permettre à un professionnel médical d’assister un autre professionnel de santé au cours de la réalisation d’un acte ;

la télémédecine est à distinguer de la télésanté . la télémédecine est l’usage des TIC par les professionnels de santé pour réaliser des actes médicaux. La télésanté concerne les services offerts à la personne par les TIC pour améliorer son bien être.

Où en est le développement de la télémédecine en France ?

Après la région pilote de Midi Pyrénées où la télémédecine s’est développée sous l’impulsion du Pr Lareng depuis 1995, d’autres régions françaises ont aujourd’hui des applications de télémédecine : la région Bretagne avec des applications qui viennent d’être validées par la HAS (la télédialyse), la Franche Comté qui a développé de remarquables applications, notamment en neurologie. La Basse Normandie a développé une application de télésuivi au domicile des patients insuffisants cardiaques. De nombreuses applications se développent aujourd’hui sous l’impulsion des sociétés savantes : la téléradiologie clinique sous l’impulsion de la société française de radiologie qui tient à ce que ce nouvel exercice soit conforme à une charte rédigée par les professionnels de santé et l’ordre des médecins,, la télécardiologie sous l’impulsion de la société française de cardiologie, la télédiabétologie sous l’impulsion de l’Alfédiam, la télé-AVC sous l’impulsion de la société française de neurologie, la télédialyse sous l’impulsion de la société francophone de dialyse etc…

La télémédecine ne peut se réaliser sans le dossier informatisé du patient. Aussi, son développement est étroitement lié aux progrès des systèmes d’informations et à leur interopérabilité selon les référentiels donnés par l’ASIP Santé.

La télémédecine favorise les nouvelles collaborations pluri professionnelles (article 51 de la loi HPST), nécessaires aujourd’hui au niveau du premier recours. Elle aide également au développement de l’éducation thérapeutique par la télésurveillance à domicile des patients.

Quels sont les freins à lever et les principales mesures à prendre pour développer ce secteur ?

Les freins juridiques sont aujourd’hui levés par la loi et le décret qui va sortir dans les prochains jours permettra à de nombreuses applications existantes de se mettre aux normes de la réglementation et à de nouvelles de se développer. Le principal frein est culturel. Il faut accompagner les professionnels de santé dans ces nouvelles organisations des soins et ces nouvelles pratiques professionnelles. La formation préalable est indispensable et la télémédecine devra être enseignée dans les facultés de médecine aux futures générations de médecins.

Il n’y a pas de freins déontologiques , le CNOM s’étant engagé résolument dans ces nouvelles pratiques depuis 2005. L’exercice médical de la télémédecine relève la déontologie médicale.

Les freins financiers sont levés dans le décret. L’identification claire des actes de télémédecine permet aujourd’hui à l’assurance maladie de les financer.

Y-a-t-il des pays plus avancés que d’autres ?

Contrairement à ce qui est dit parfois dans les médias, la France n’a pas de retard dans le développement de la télémédecine. Elle est aussi avancée que le Québec, par exemple. Un pays comme la Norvège l’a développée depuis 20 ans car il en avait besoin pour assurer la continuité des soins auprès des populations du grand Nord. La France a pris de l’avance sur certains pays européens en lui donnant un cadre juridique claire.

Le retard dont parle les médias touche le marché de la télésanté, ce qui est différent de la télémédecine comme je l’ai dit précédemment.

Quelles politiques publiques ont-elles été mises en place pour arriver à cette position ?

Le Ministère de la santé a toujours eu la volonté politique de développer la télémédecine. Elle vient de se donner les moyens juridiques de son essor, car la télémédecine est aujourd’hui un bras de levier nécessaire pour réorganiser l’offre de soins hospitalière et développer la prise en charge au domicile des patients atteints de maladies chroniques. Dans cette période où les ressources financières de la solidarité nationale ont des limites, des efforts doivent être faits par tous les acteurs de la santé pour que les organisations et l’accès aux soins soient efficientes. La télémédecine
aide à réaliser un tel objectif.

Http://www.antel.fr

 


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