Longévité : vers une stagnation de l’espérance de vie ?

pyramide de âge avec espérance de vie
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Au cours des trois dernières décennies, la question des limites potentielles de la longévité humaine a fait l’objet de nombreux débats et de prédictions variées.

Alors que certaines projections optimistes prévoyaient une augmentation continue et régulière de l’espérance de vie, les données récentes montrent que ce phénomène a ralenti de manière notable dans plusieurs régions du monde.

Les points clés du texte :

  • Ralentissement de l’espérance de vie : Depuis les années 1990, l’espérance de vie a cessé d’augmenter aussi rapidement qu’auparavant.
  • Mortalité des personnes âgées : Le taux d’amélioration de la mortalité chez les 65 ans et plus n’est pas suffisant pour un allongement radical de la vie humaine.
  • Prédictions démenties : Les prévisions de vie radicalement plus longue ne se sont pas réalisées, et les gains observés sont bien inférieurs à ceux attendus.
  • Limites de la longévité : Les pays à revenu élevé semblent avoir atteint une limite souple de l’espérance de vie, difficile à repousser sans avancées médicales majeures.
  • Rôle de la médecine : Les gains récents en espérance de vie sont largement attribués aux interventions médicales et de santé publique, appelés « temps manufacturé. »
  • Thérapies du vieillissement : Bien que la recherche sur des thérapies pour ralentir le vieillissement biologique avance, leurs effets ne sont pas encore prouvés pour prolonger radicalement la vie.
  • Limites de prévision : Les prévisions linéaires basées sur les tendances passées surestiment souvent l’espérance de vie future, car elles ignorent les contraintes démographiques actuelles.
  • Impact sur les industries : Les assurances et retraites pourraient être mal calibrées si elles continuent à surestimer la survie à long terme.
  • Incertitudes futures : La durée de vie humaine pourrait encore être modifiée avec de nouvelles avancées en gérothérapie, mais ces effets ne sont pas encore mesurables.
  • Perspective optimiste : Malgré ces limites, l’humanité a déjà fait d’énormes progrès dans la réduction de la mortalité, notamment grâce à la santé publique et la médecine.

Des pays comme Hong Kong, le Japon, et les États-Unis, qui ont longtemps été à la pointe des gains en longévité, enregistrent désormais un ralentissement, notamment pour les populations âgées. Par exemple, pour les personnes âgées de 65 ans et plus, les améliorations du taux de mortalité ont été plus marquées durant la période allant des années 1950 aux années 1990, avec une progression de 30,2 % entre 1990 et 2019.

Cependant, cette amélioration ne s’est traduite que par un gain de 2,5 ans en termes d’espérance de vie pour cette tranche d’âge, un chiffre bien inférieur aux estimations antérieures qui prévoyaient des gains plus conséquents, à hauteur de trois ans par décennie.

L’entropie des tables de mortalité

L’une des principales raisons de ce ralentissement est attribuée à l’entropie des tables de mortalité. Ce concept met en lumière le fait qu’au fur et à mesure que les populations vieillissent et que la mortalité diminue, les gains supplémentaires en espérance de vie deviennent plus difficiles à atteindre.

En d’autres termes, les progrès réalisés en matière de réduction de la mortalité parmi les personnes les plus âgées sont naturellement limités, car les causes de décès deviennent plus diversifiées et plus difficiles à combattre. Cette « entropie » a davantage d’impact aujourd’hui qu’elle ne l’avait à la fin du XXe siècle, époque où les progrès médicaux et technologiques étaient relativement nouveaux et avaient un effet de levier plus important sur l’allongement de la vie.

Des dynamiques démographiques complexes

Les prédictions passées, qui prévoyaient une accélération continue de l’espérance de vie, ont souvent échoué à prendre en compte ces dynamiques démographiques complexes. En conséquence, elles ont tendu à surestimer la longévité future des populations.

Bien que des progrès dans la médecine, tels que l’émergence des thérapies anti-âge, les nouvelles découvertes en génétique ou en gériatrie, ou encore la réduction des facteurs de risque liés aux modes de vie, pourraient potentiellement jouer un rôle dans l’allongement de la vie humaine, leur impact reste à ce jour incertain. Les innovations médicales, bien qu’enthousiasmantes, n’ont pas encore démontré de manière décisive qu’elles pouvaient ralentir suffisamment le vieillissement biologique pour provoquer une augmentation massive de l’espérance de vie.

La notion de « seconde révolution de la longévité » est souvent évoquée par ceux qui croient en l’essor des gérothérapies et des techniques visant à ralentir le processus de vieillissement. Ces interventions visent à s’attaquer directement aux mécanismes biologiques du vieillissement, plutôt qu’à simplement traiter les maladies associées à l’âge.

Toutefois, ces technologies sont encore en phase expérimentale et leur mise en œuvre à grande échelle pourrait prendre plusieurs décennies. Ainsi, les affirmations selon lesquelles les enfants nés aujourd’hui atteindront systématiquement l’âge de 100 ans semblent prématurées, voire exagérées. Les données actuelles ne soutiennent pas l’idée d’une transformation aussi radicale de la longévité humaine dans un avenir proche.

Peu d’impact à court terme des gérothérapies

Même si l’on suppose que des avancées importantes en matière de ralentissement du vieillissement seront réalisées, il est peu probable que celles-ci affectent immédiatement l’ensemble de la population. Les bénéfices pourraient être concentrés dans les groupes les plus riches et les mieux éduqués, créant ainsi un fossé encore plus grand en matière d’inégalités en santé.

De plus, le vieillissement est un processus complexe, influencé non seulement par les facteurs biologiques, mais aussi par des déterminants sociaux, économiques et environnementaux. Les facteurs de mode de vie, comme la nutrition, l’exercice physique, et les soins médicaux préventifs, joueront encore un rôle crucial dans la détermination de la longévité individuelle.

Cela dit, l’histoire récente montre que des progrès notables ont été accomplis. Les avancées de la médecine moderne, de la santé publique et de l’hygiène ont déjà permis une réduction spectaculaire des taux de mortalité dans de nombreuses régions du monde et ont prolongé la durée de vie moyenne des êtres humains.

Les campagnes de vaccination, l’amélioration des conditions sanitaires, les progrès dans la lutte contre les maladies infectieuses, et la mise en place de systèmes de santé publique plus efficaces ont tous contribué à cette amélioration globale de la santé et de la longévité. Les projections pessimistes des décennies passées, qui anticipaient une stagnation de l’espérance de vie, se sont avérées erronées à maintes reprises.

Des changements sociétaux profonds nécessaires

Ainsi, bien que l’humanité ait déjà réalisé des progrès impressionnants dans le prolongement de la durée de vie moyenne, il est peu probable que les limites biologiques actuelles soient surmontées dans un avenir immédiat. Les prochains grands gains en longévité nécessiteront non seulement des innovations médicales de rupture, mais aussi des changements sociétaux profonds, tels qu’un accès plus large aux soins de santé de qualité, une alimentation plus saine et des environnements plus propices au bien-être.

En attendant, la poursuite des efforts pour améliorer la prévention des maladies et promouvoir un vieillissement en bonne santé semble être la voie la plus prometteuse pour prolonger encore davantage la vie humaine.

Source de l’étude : Olshansky, SJ, Willcox, BJ, Demetrius, L. 
et al. Implausibilité d’une prolongation radicale de la vie chez les humains au XXIe siècle. 
Nat Aging (2024). https://doi.org/10.1038/s43587-024-00702-3

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