Les Danois devront travailler plus longtemps, jusqu’à l’âge de 67 ans, afin de pouvoir financer le coûteux régime de l’Etat-providence menacé par le vieillissement croissant de la population. Mais cette décision annoncée mardi par le gouvernement libéral-conservateur et une large majorité du Parlement a reçu un accueil mitigé, mercredi, notamment de la part du Patronat et d’économistes qui jugent le paquet de réformes pour sauver la société de bien-être, insuffisant et manquant d’ambition.
Après trois années de réflexions et de débats, le gouvernement d’Anders Fogh Rasmussen et la plupart des partis de la majorité et de l’opposition ont convenu notamment de prolonger progressivement de deux ans l’âge de la retraite à 67 ans, et deux ans également l’âge de la pré-retraire volontaire à 62 ans, à l’horizon 2019-2027.
Le Danemark n’a pas le choix «s’il veut préserver sa politique de bien-être», selon le ministre des Finances, Thor Pedersen, car «c’est un défi de financer les dépenses sociales quand il y a plus de personnes âgées inactives et moins de jeunes», a-t-il affirmé mercredi sur la chaîne nationale TV2.Pour lui, «il est clair qu’on vit plus longtemps et qu’on devrait (en conséquence) travailler plus longtemps».
Dans les décennies à venir, le gouvernement escompte 400.000 personnes de plus de 60 ans d’ici à 2040, et 375.000 en moins dans la tranche d’âge entre 20 et 60 ans. Ainsi en 2040, sur une population estimée à 5,2 millions, il y aurait 1,5 million de plus de 60 ans contre 1,1 million en 2005, et 2,6 millions de groupe d’âge 20-60 ans pour 3,0 millions actuellement.
Pour financer les dépenses croissantes de retraites et de santé des personnes âgées qui vivent plus longtemps, le gouvernement estime «essentiel de maintenir le plus longtemps possible les citoyens, donc les contribuables, au travail».Le Danemark manque déjà de bras à l’heure actuelle, dans divers secteurs, et le taux de chômage est le plus bas depuis plus de 30 ans, à 4,8% de la population active, fait-il observer.
Critiquant le manque d’ambition de ce paquet de réformes, Joergen Soendergaard, directeur de l’Institut de recherches sociales, a estimé qu’«il y a besoin à terme de réformes supplémentaires si nous voulons avoir les moyens d’offrir le bien-être à un nombre croissant de vieux alors que la société comptera de moins en moins d’actifs», cité par le quotidien Berlingske Tidende (conservateur).
Il constate que ces réformes ne feraient augmenter l’emploi que de 126.000 personnes seulement en 2040 alors qu’il en faut le double pour financer la société de bien-être future. Le directeur de la confédération patronale Joern Neergaard Larsen, s’est déclaré également sceptique sur la portée de ces réformes.«C’est un pas dans la bonne direction en relevant l’âge de la préretraite à 62 ans. Mais le mieux aurait été de supprimer complètement ce régime» onéreux et qui prive la société d’une main d’oeuvre dont elle a besoin, estime-t-il.
Environ 180.000 Danois (environ 5% de la force de travail) bénéficient de ce régime de préretraite, très populaire, qui coûte quelque 25 milliards de couronnes danoises (3,35 milliards d’euros) par an à l’Etat, selon des estimations du ministère des Finances de décembre 2005.Ce régime, destiné en premier lieu aux ouvriers usés par le travail, attire de plus en plus de gens qui y cotisent pour pouvoir bénéficier d’allocations d’environ 1.900 euros avant impôts par mois, correspondant à environ le double du montant de la retraite.
Résumant les réserves d’économistes, l’expert Soeren Soendergaard de la commission de la politique de bien-être, qui a présenté cet hiver un rapport contenant des centaines de recommandations au gouvernement, «il sera nécessaire de faire plus» pour préserver l’Etat-providence en entier.