L’état du marché des services à la personne en France

Les services à la personne emploient en France plus d’1,3 million de personnes et représentent environ 3 % du PIB. Ils sont utilisés par une part croissante de la population et constituent l’un des secteurs les plus dynamiques de l’économie en termes de créations d’emplois. Pourtant, ce secteur d’activité, promis à un développement rapide, reste dans l’ensemble méconnu.

De la difficulté à mesurer les services à la personne

La mesure de la contribution à l’économie des services à la personne est délicate pour plusieurs raisons. Tout d’abord selon les sources utilisées, la définition des services à la personne est fluctuante, comme en atteste la diversité des appellations de ce secteur : services aux particuliers, aides à la personne, services à domicile, emplois familiaux, etc. Ensuite, ces activités, très variées dans leur nature, peuvent être exercées au domicile du particulier (jardinage, garde d’enfants), chez le prestataire (garde d’enfant chez une assistante maternelle), sur le lieu de travail du particulier (crèche, service de pressing) ou encore dans un magasin (salon de coiffure), ce qui complexifie un peu plus l’exercice de cartographie du secteur. Enfin, l’importance du travail au noir (estimé par l’Insee à 60 % du nombre d’heures travaillées) exige une grande prudence dans l’interprétation des données disponibles. Ainsi, le suivi statistique du secteur est un exercice délicat. Les données présentées ici proviennent majoritairement de la Dares (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, dépendant du Ministère de l’Emploi, du Logement et de la Cohésion Sociale). Elles mesurent les services à la personne dans une acception très proche de celle retenue dans le plan Borloo : emplois correspondant à des prestations destinées aux particuliers et réalisées à leur domicile.

L’un des secteurs les plus dynamiques de l’économie française

Sur les dix dernières années, le nombre d’heures travaillées chez les particuliers a plus que doublé, pour atteindre près de 650 millions en 2004, soit l’équivalent de près de 400 000 postes à temps plein . Plus d’1,3 million de personnes travaillent dans ce secteur, majoritairement des femmes. Les trois quarts de ces personnes travaillent à temps partiel. L’accroissement du nombre d’heures travaillées dans les services à la personne bénéficie dans des proportions croissantes aux structures prestataires agréées, qui fournissent les prestations de services avec leurs moyens et leur personnel propres. En 2004, 22 % du total des heures travaillées chez des particuliers,étaient payées à des organismes prestataires agréés, contre à peine 7 % 10 ans plus tôt. Concomitamment à la hausse du nombre d’heures effectuées,le nombre de particuliers employeurs a également fortement augmenté ces 10 dernières années : 1,7 million de particuliersemploient un ou plusieurs salariés à leur domicile, contre environ 500 000 il y a 15 ans.

La structure de l’offre

Parmi les activités de services, les services à la personne sont le secteur le plus fragmenté. Cet émiettement est un frein majeur au développement et un facteur d’inefficacité. L’existence de structures prestataires est par exemple largement ignorée du grand public. Concrètement, une meilleure organisation permettrait de mettre en relation une offre et une demande, toutes deux substantielles.

De multiples formes de structures d’offres cohabitent sur le marché des services à la personne. L’Agence nationale des services à la personne les classe en cinq catégories : • deux millions de particuliers employeurs représentés par la Fédération des particuliers employeurs (FEPEM) ; • plus de 6 000 associations adhèrent à des réseaux tels que l’UNA, l’UNADMR, la FNAID, ADESSA, Familles rurales,le COORACE ou la FNARS ; • plus de 600 entreprises privées (encore peu présentes dans ce secteur), PME ou TPE, en forte croissance et représentées par le Syndicat des entreprises de services à la personne ; • les centres communaux et intercommunaux d’action sociale (CCAS et CIAS), regroupés en partie au sein de l’UNCCAS (Union Nationale des Centres Communaux d’Action Sociale) ; • les grands groupes de l’économie sociale et solidaire (mutuelles, Caisses d’épargne, Crédit mutuel, Banques populaires, etc.) ou de l’économie privée (Accor, AXA, Sodexho, Europ Assistance, ADIA, etc.). Le développement du secteur privé est spectaculaire : on recensait moins de 100 entreprises privées intervenant dans le secteur des services à la personne en 1998 et plus de 2000 en mars 2006, avec une croissance marquée à partir de 2004. À l’intérieur même du secteur marchand, les modèles d’organisation et de développement sont multiples :

• Services joints : ce modèle repose sur l’ajout de services à la personne, éventuellement sous-traités à un prestataire, au service de base de l’entreprise. Auchandirect a ainsi récemment lancé un service de pressing à domicile, sous-traité à une société spécialisée. • Service mono-activité : Shiva, l’Adhap ou encore Acadomia,sont des entreprises spécialisées dans un domaine d’activité. Respectivement pour le ménage, le maintien à domicile et l’aide aux études. • Interim : certaines entreprises d’interim se spécialisent dans les services à domicile, comme Adom.

Les caractéristiques de la demande

La cartographie de la nature exacte des services à la personne consommés aujourd’hui est difficile à réaliser, hormis pour certaines prestations spécifiques qui donnent lieu à un traitement social particulier telle l’AGED/PAJE (garde de jeunes enfants). On peut remarquer que les formes d’emplois « classiques » relevant d’une DNS (déclaration nominative simplifiée, envoyée trimestriellement à l’Urssaf) perdent régulièrement du terrain au profit de l’utilisation du chèque emploi service (aujourd’hui Chèque Emploi Service Universel ou CESU).

Différentes études montrent que les ménages comptant un ou plusieurs enfants de moins de 15 ans, mais surtout les personnes âgées ont un recours beaucoup plus fréquent à ces services que le reste de la population. Cette caractéristique contribue probablement à expliquer en partie l’étonnant clivage géographique entre les régions de l’Est et de l’Ouest de la France, qui semble transcender les déterminants traditionnels de recours aux services à la personne que sont notamment le niveau de revenu ou la taille de l’agglomération de résidence. Les régions de l’Ouest, où le poids des personnes âgées est légèrement supérieur à la moyenne nationale, recourent en effet plus souvent à l’emploi à domicile.

Conclusion

L’essor des services à la personne est une réalité et il s’est considérablement accéléré ces dix dernières années, sous l’effet conjugué d’un accroissement des besoins des Français et de la volonté des pouvoirs publics de faire croître ce secteur, créateur d’emplois à domicile. Fait remarquable, cette croissance s’est réalisée malgré la présence de nombreux freins. Ce qui permet d’envisager un potentiel de croissance beaucoup plus important qu’aujourd’hui si les différents acteurs du marché parviennent à débloquer ces freins, tant au niveau de la demande que de l’offre de services. La création de platesformes de services à la personne devrait être un des catalyseurs de ce développement.

 

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